Fraîchement inscrit pour la 2e édition de la French Divide qui se déroulera en Août prochain, il est temps de rouler, de rouler et surtout rouler. Un rude challenge et pour optimiser les chances de réussite, non pas de faire une quelconque place, faut pas déconner, mais plutôt caresser l’espoir d’obtenir le brevet de la French Divide (Ce n’est pas une course), si possible dans les temps et dans les meilleures conditions.
Avec ce beau projet en tête, je me dis, tiens pourquoi pas tester un peu le matos, la logistique “Bikepacking”ce Week-end ? Histoire d’avoir un peu de dépaysement et du dénivelé, les Ardennes sont qu’à 3h de route. Donc, direction le Luxembourg, que j’ai déjà sillonné en « trek » 2 fois. Les paysages sont magnifiques et méconnus ! Mon expérience dans le bikepacking se limite à une semaine en Juillet dernier, de Dunkerque à Angers. En comparaison d’un trek “pédestre”, la logistique me paraît quand même assez similaire… On verra bien !
Sachant que pour finir la French Divide, il faut faire au moins 150 km par jour en 15 jours, les objectifs de cette sortie étaient de faire le Tour du Luxembourg en 2 jours et demi pour environ 360 km, le tout en bikepacking.
Ce qui était prévu...
De la neige partout !
Si j’ai opté pour le Luxembourg, c’est qu’ils ont un réseau de pistes cyclables hallucinant, super bien entretenu et très bien balisé ! Je me prépare donc un ptit parcours qui me paraît bien sympathoche.
Départ 6h du mat de Dunkerque vendredi matin. Embouteillage sur Bruxelles. Plus j’approche du Luxembourg, plus la température descend et plus le paysage blanchit… C’est superbe ! La montagne à 3h de chez nous !
Je pose la voiture à Eischen, juste à côté d’une section de piste cyclable. Je prépare le bijou, je pense avoir tout. En tout, vélo compris, cela représente 25 kilos, sachant que j’ai la bouffe pour 2 jours et demi, la tente, matelas et sac de couchage adaptés (ou pas) aux conditions hivernales (polaires !).
C’est parti, je mets en route le GPS et je commence par me planter d’entrée de jeu ! La tête sur le GPS, je rate le panneau qui était devant mon nez. Demi-tour ! ça tombe bien la piste était vraiment enneigée !
Un vrai billard ces pistes !
Toujours aussi superbe...
Cascades de Glace
Je m’engage cette fois ci sur la piste cyclable qui n’est rien d’autre qu’une ancienne voie ferrée reconvertie (comme les nombreuses voies vertes françaises). Il n’y a personne, il fait beau, froid et sec, ça roule bien, c’est plutôt plat (pour le moment). La sacoche de selle ne balance pas trop, et je suis bien content d’avoir troqué mes pneus d’été contre des pneus hivers de bonne qualité et un peu plus large, il y a beaucoup de neige par endroits !
J’arrive très vite dans un tunnel glacial et au bout d’une centaines de mètres, les infiltrations d’eau ont créé des cascades qui sortent du mur ! Magique ! Y’a une ambiance là-dedans… Obligé de poser pied à terre car c’est une vraie patinoire !
Je poursuis et me rend compte que je ne suis pas la bonne trace (encore…) 5 bornes dans la mauvaise direction ! ?? En fait, la trace que j’ai importée a la même couleur que le réseau de mon fond de carte… Boulet ! Je mets la trace en noir et c’est reparti, demi-tour, 10 km dans le vent !
Très vite, et au fur et à mesure que j’atteins les contrées du Nord du pays, le relief se forme, et il y a de plus en plus de neige… Je n’avance à rien sur les pistes cyclables parfois complètement enneigés, obligé d’y aller à pied. Je dois improviser et je dois prendre le réseau secondaire et donc avec la circulation… Moins fun et plus dur aussi !
Faut des skis de fond!
ça roule pas des masses...
Au bout de 50 km environ, je m’arrête manger à Bavigne près du lac de Sûre qui est complètement gelé ! Une soupe, purée thon à l’huile et je prends un café à l’auberge juste à côté. Je discute avec le cuistot, super sympa et je lui demande s’il y a toujours autant de neige à cette époque ! Il me dit qu’il y a moins 1m de neige normalement ! Non il déconne, mais oui il y a de la neige tout le temps à cette époque… Ce que naïvement, je ne soupçonnais pas ! Cela ne m’a pas du tout traversé l’esprit ! En tout cas, le type est super sympa ! Vélo en solo, le contact avec les gens est super facile, j’adore !
Je repars, un peu froid, surtout après manger… Mon syndrome de Reynaud met à mal mes mains, mes pieds je ne les sens plus depuis un bail malgré les sur chaussures bien épaisses…
Avant d’entamer une portion de piste enneigée, je tombe sur des lamas ou des alpagas (?), trop marrant leur tête !
La nuit commence à tomber, et j’ai déjà revu mes objectifs, je n’avance pas des masses. Malgré tout je tente la plupart du temps les pistes cyclables mais souvent obligé de faire demi-tour. C’est dommage, ça a l’air vraiment super ! Je reviendrais !
Je vais être loin des 150km journalier, il fait nuit noire, il fait froid, je suis un peu crevé mais déterminé ! Je me dis que je fais au moins 100 km et à partir de là, je cherche de l’eau et un coin pour bivouaquer.
Arrêt déjeuner: soupe et purée thon à l'huile!
Dans un petit patelin (Schlindermandersheid, pour être précis), je sonne à une maison au hasard (enfin presque, il y a de la lumière) pour quémander un peu d’eau. La jeune fille accepte volontiers et m’offre une seconde bouteille minérale à température ambiante, un régal ! Merci !
Je fais 3-4 km de plus, et j’arrive à une section sur chemin, je m’y engage, nuit noire totale. Je traverse un bois puis j’arrive dans une sorte de combe bien enneigée. Aucunes lumières, aucun bruit, personne en vue, je quitte le chemin et fais une centaine de mètre dans un champ de neige pour planter la tente près d’un bois. Ambiance garantie également ! Le sentiment d’être perdu, seul au bout du monde, pas besoin d’aller en Islande ! Il fait même plus froid !
1h plus tard, je suis dans la tente en train de manger un risotto aux champignons, « au chaud ». 20h30 extinction des feux, je m’emmitoufle dans le duvet avec mes 50 épaisseurs.
Malgré le bon matos, la couverture de survie au sol, le tapis gonflable, je me réveille souvent par le froid. Pas frigorifié, mais pas chaud chaud quand même… J’arrive néanmoins à dormir et à récupérer. Une belle et bonne 1ère journée, avec 110km et 1800m de D+ 🙂
Quand lama fâché...
Bivouac Glacé
Réveil à 6h repousser 7h30 puis je mets en branle tout le bazar. Cela me prend une bonne heure et demie avant de repartir du champ de neige. Je commence à pied car c’est complètement enneigé ! Puis arrivé en haut de la colline, je remonte sur le bijou et je me prends une méchante gamelle sur une plaque de verglas, je me retrouve la figure dans la neige… ça réveille !
Je remonte sur le vélo, un peu fébrile et entame une descente en lacet, superbe…ment verglacée, 10 de moyenne, les mains rivées sur les cocottes et les freins. Usant cette descente… En bas, je tente de suivre la piste et ça passe plutôt bien ! On longe la Clerve qui serpente entre les collines verglacées, c’est magnifique ! Et bien sûr il n’y a personne… J’arrive à Lellingen et je tente de continuer sur la piste. Demi-tour toute, quand je manque de me ramasser une seconde fois.
Il se met à pleuvoir, ma bouteille d’eau gèle, je ne bois pas beaucoup et pas assez. Cela devient dur, le dénivelé est important (pour un gars du plat pays) et surtout je me suis aperçu que je n’ai pas la transmission adaptée pour ce relief, la moindre côte, je dois me mettre en danseuse et passer tout en force. Impossible de mouliner ! Mes cuisses souffrent et je sens mes tendons tirer Il faut réfléchir. Je m’arrête à un carrefour, j’ai fait 20 km, j’ai une moyenne de 13 km/h en mouvement ! Je ne finirai jamais le tour dans le week-end. Pendant que je fais le point, je marche de long en large pour récupérer mes pieds.
Faut rester prudent...
Moins marrant sur la route...
Il fait froid, les pistes cyclables sont impraticables, je n’ai pas le vélo adapté, je suis sur les routes avec les voitures et camions, c’est dangereux. Décidé, j’écourte l’aventure ! Direction Ettelbrück par la nationale. J’arrive là-bas transi de froid, je sors un peu de la ville pour manger, et prend la décision de retourner à la voiture dès ce soir. Ce n’est pas grave, faut savoir renoncer et ne pas se dégoûter ! 2 jours c’est suffisant dans ces conditions ! Déjà l’impression d’être parti plus longtemps !
Il reste une trentaine de kilomètres, je prends le réseau secondaire. C’est plaisant, il y a de moins en moins de neige vers l’Est. Je repasse par une section de la veille et là je chute violemment sur une plaque de verglas. Je me fais mal au genou et heureusement qu’il y avait un arbre sinon j’aurai dévalé le talus (rien de bien méchant). Je repasse dans le tunnel glacé puis retour à la voiture et Dunkerque !
Un bien bon séjour, une bonne expérience, un dépaysement rapide et de bonnes sensations malgré tout !
Au final, sur 2 jours, un total de 189,4 km et un D+ de 2926m, plutôt content pour une première grosse sortie 🙂