Après les émotions de notre dernière nuit, nous nous réveillons vers 06h30.Le névé qui était à côté de nuit à complètement gelé mais on n’a pas eu froid de la nuit. Tant Mieux !
J’allume mon portable afin d’avoir des nouvelles de Jeff que l’on est censé retrouver demain ou après-demain sur la mer de glace.
Bip bip !
« Glacier Eyabakajökull impraticable selon les rangers, ils me font passer à l’Est ( ??), Bruar hors de … »
Il me manque la fin du message ! Hors de question ? Hors de portée ? Merde… Je lui réponds mais pas de réponse.
Que faire ? Le glacier en question, l’ Eyabakajökull est censé être notre porte de sortie pour atteindre l’Est du glacier et notre en entrée dans le Lonsoroefi et le trail de Mulaskali. Quelques mois auparavant, les rangers m’avaient averti par mail que ce glacier avait pas mal rétréci…
On check l'entrée sur le glacier
Phase d'approche en plein Wild
En tout cas, merci Jeff pour cette infos capitale car nous changeons nos plans. Nous allons tout de même essayer d’atteindre le glacier, voir comment il est, si c’est praticable et l’on sortira du glacier Bruarjökull au niveau de la F902. Nous ne pourrons donc pas aller vers l’Est en raison d’une immense rivière glaciaire dont le seul pont se trouve à plusieurs dizaines de kilomètres au Nord. Cela ferait un trop grand détour. Du coup, on opte pour aller faire un tour du côté du Snaefell et atteindre le lodge de Laugarfell avec ses sources d’eaux chaudes. Cela conclura notre trek.
Bon, on sait ce que l’on fait. On décolle. On termine la piste balisée et l’on se lance dans le wild et la phase d’approche du glacier. Le début est facile, le paysage est lunaire, désertique, pas âme qui vive. A partir de maintenant, les prochains êtres humains que nous verrons, ce sera dans 3 jours. Isolement garantie…
On tombe toutefois sur un cairn isolé et on aperçoit au bout d’une piste un 4×4 isolé… Le temps est superbe, nous progressons sur un champ de moraines au pied des montagnes imposantes du Kverkfjoll.
Soudain, au détour d’un petit col, nous pouvons admirer notre future trace. Le bord du glacier puis les 60km de glace, inconnues, que nous allons devoir traverser et au loin et si proche, le Snaefell qui se dresse derrière les nuages. Un frisson de peur et d’excitation me parcourt l’échine. Nous approchons du moment tant attendu et tant redouté depuis la préparation de cette aventure.
Nous nous arrêtons déjeuner à environ 1 km à vol d’oiseau de la bordure du glacier. S’en approcher semble impossible… Comme il y a du vent, on monte la tente rapidement pour que je puisse faire chauffer l’eau. Une sieste au soleil et dans un silence assourdissant. Seul les écoulements lointains et les craquements du glacier perturbent la quiétude des lieux.
La suite de l’approche est plus difficile. Bien que nous ayons les traces GPS de nos prédécesseurs qui sont passés ici il y a quelques années, nous devons improviser avec la topographie. Nous tombons nez à nez avec un canyon très profond et infranchissable. La trace d’Olivier est pourtant pas si loin que ça. On décide de se diriger vers la dite trace. Nous traversons de nombreux pierriers instables qui surplombent le canyon et nous arrivons à une sorte de plateaux qui précède le canyon. Nous passon aisément à gué la rivière et nous voici maintenant quelques centaines de mètres du glacier. Merci Olivier !
Le voilà, le Bruarjökull
Comment franchir ce canyon ?
Changement de direction à travers les pierriers
A l'abri pour faire chauffer l'eau
Passage à gué pour éviter le pont de glace
C'est par là haut là bas
Encore une côte et nous y sommes. Il reste une descente dans de la cendre volcanique et l’on foulera la glace tant attendue.
Je stress, j’ai peur, j’ai besoin de savoir que Géraldine est consciente dans quoi on s’engage, j’ai besoin d’entendre sa voix, de parler mais elle reste silencieuse. Mon appréhension s’exprime par une petite dispute avec elle, juste le temps de se parler, de se rassurer mutuellement puis d’enfiler les baudriers, s’encorder et enfin de monter sur la glace.
J’ouvre la trace. Je descends prudemment dans les amas de cendres qui recouvrent en fait déjà de la glace. En bas, je prends pied sur le Bruarjökull, officiellement. Géraldine me suit et ça y est, nous sommes dessus. La glace est bien dure, il y a peu de neige. Tout ça pour ça ?
Le glacier est recouvert de cendres, il y a plein de monticules, zones noires. Il est « sale ». Mais il est plat et la progression est plutôt facile pour le moment. Nous sommes en plein milieu de la journée, cela ruisselle de partout !
Sur le Glacier ! Enfin !
Nous croisons nos 1ères crevasses que l’on enjambe très facilement. Nous passons à côté de quelques moulins mais rien de bien méchant, il suffit d’ouvrir les yeux ! Toutefois, d’après la carte nous nous dirigeons vers une zone orange, autrement dit une zone moyennent crevassée. Nous descendons donc un peu vers le Sud vers la zone peu crevassée. Sauf que vers le Sud, on se dirige vers le centre du glacier. Il y a beaucoup de neige ! Du coup, on ne voit pas ce qu’il y a en dessous… Quitte à ce qu’il y ait plus de crevasse, autant les voir… Nous redescendons donc vers le Nord. Nous avons parcouru quelques kilomètres et nous sommes bien fatigués. La phase d’approche a été rude et la tension vis-à-vis du glacier a mis nos nerfs à rudes épreuves. Nous trouvons une plateforme relativement plate et l’on étrenne la broche à glace pour planter notre tente. Nous sommes à environ 35 km de la sortie, on va peut-être tout faire demain… J’espère !
Nous sommes donc tous les deux, « perdus » dans cette immensité glacée. La sensation est hallucinante. On a vraiment l’impression d’être en expédition polaire…
Au revoir le kverkfjoll
Notre destination, le Snaefell
1er bivouac glacé
Un petit peu de géographie et quelques chiffres. Nous sommes donc sur une des langues glaciaires du 2e plus grand glacier d’Europe, le Vatnajökull a une superficie de 8300 km². En comparaison : Paris fait 105,4 km², le département de la Mayenne fait 5 175 km² ou cela représente environ 95% de la superficie de la Corse (merci wiki). Vous l’avez compris, ce glacier est immense !!! L’épaisseur maximum est de 1000 m recouvrant de nombreux volcans. Et nous, on est dessus ! Tous seuls J